En ce weekend d’élections présidentielles, j’ai choisi pour ce billet de partager avec vous une réflexion de François Richaudeau, parue dans son livre « Le langage efficace ».
En effet, j’y ai vu un parallèle flagrant avec le langage d’action de nos hommes et femmes politiques candidats aux présidentielles… surtout après avoir lu – ou plutôt – parcouru leurs « professions de foi » respectives.
L’auteur y décrit quelques-unes des composantes du langage d’action et montre ainsi :
- Comment le discours doit s’adapter aux mécanismes de mémorisation de l’auditeur ;
- Comment l’émetteur doit se caler sur son ou ses récepteurs.
Cet expert en sciences du langage atteste ainsi qu’écrire, c’est communiquer, que le texte soit destiné à être entendu (discours) ou lu (document papier ou numérique). Dans les deux cas, la spécificité de cette écriture est qu’elle relève du langage de l’action.

Extrait.
Conviction
Il est beaucoup plus difficile qu’on ne pourrait le penser et d’écrire (ou de parler), d’une façon efficace, dans un sens contraire à sa conviction profonde. Autrement dit, pour être vraiment convaincant, l’émetteur doit être lui-même convaincu, croire au succès l’action qu’il préconise, au succès de cette action, mais pas forcément à la véracité des arguments et des promesses qui la sous-tendent. Et cette conviction, intégrale, de l’émetteur se traduit dans son langage par l’absence de tout doute, par des affirmations brutales dénuées de toute nuance.
Ressorts psychologiques
Les ressorts psychologiques de langage action sont souvent sommaires et presque toujours affectifs :
- Il explique, mais sans trop s’étendre et avec des arguments soigneusement filtrés ;
- Il promet facilement et sans trop s’inquiéter de la réalisation de ses promesses ;
- Il flatte : c’est, somme toute, une forme immédiate de récompense pour le récepteur, et s’adresse aux pulsions les plus profondes de ce récepteur, et ne coûte rien à l’émetteur ;
- Il lui arrive même de dramatiser, d’exciter les récepteurs, plongeant encore plus bas dans l’inconscient de ceux-ci ;
- Et parfois, il peut lui arriver de paraître sincère, humain, de se mettre au niveau des récepteurs, de communier avec eux.
Phrases et mots
Pour être perçus, compris, retenus par les récepteurs, tous les langages d’action doivent être adaptés aux servitudes psychologiques strictes de ceux-ci. En particulier :
- Les phrases doivent être relativement courtes, en moyenne ne pas dépasser 15 mots chacune, et être à structures syntaxiques simples ;
- Les mots doivent être courants, communs ; connus des récepteurs, employés dans des sens qui leur soient familiers.
Évocation des mots
L’homme d’action choisit de préférence les mots à évocation « positive », puissante, dynamique… Et évite les mots à évocation « négative », faible, pessimiste…
Ce qui le conduit, ici encore, à éliminer les nuances, à forcer ses effets, à paraître toujours sûr de lui. Parmi les mots à évocation positive, il semble choisir plus spécialement ceux qui se rapportent :
- À l’instinct de puissance,
- À l’instinct de survie,
- À l’instinct de territoire,
- Et, enfin, aux instincts de justice et de bonheur.
Éthique
Il ne semble – hélas !- pas exister de corrélation entre l’efficacité du « langage action politique » de l’action.
Rien à ajouter à cette dernière phrase… Écrite dans un ouvrage paru en 1973 !